Le Festival international de film spirituel, religieux, éthique redémarre sur de nouvelles bases. Catégories repensées, ouverture sur la jeunesse et questionnements actuels sont au programme du 15 au 17 novembre au cinéma Rex de Neuchâtel. Interview avec Camille Andres, directrice du Prix Farel et rédactrice au journal Réformés.
Quelles sont les nouveautés de cette année ?
Nous avons une nouvelle catégorie « explainers », dédiée à des formats courts issus du web, qui se démocratise et change nos manières de s’informer, y compris sur le fait religieux. Nous organisons également des débats qui s’interrogent sur ces formats et qui s’adressent aussi bien aux professionnels qu’au au grand public. Une toute nouvelle équipe s’est mise en place pour l’organisation et nous projetterons les films dans un nouveau lieu, le cinéma Rex, qui est doté d’un restaurant. Nous avons également repensé toute la communication avec des vidéos réalisées par un jeune influenceur et plus de présence sur les réseaux sociaux. De plus, un explainer sur Guillaume Farel, produit grâce au soutien financier des Églises Refbejuso, sera diffusé fin septembre… Bref une communication encore plus visuelle.
Un coup de jeune nécessaire ?
Farel est un festival tout public, pour toutes personnes qui se sentent, de près ou de loin, concernées ou interpellées par le fait religieux, les questions éthiques et spirituelles. Nous souhaitons garder cette identité, c’est d’ailleurs pourquoi le festival reste gratuit, tout en pratiquant le prix libre puisque nos moyens sont contraints. Nous sommes ravis de pouvoir parler aux jeunes, et il nous importe de réussir à les interpeller, mais on ne souhaite pas perdre nos habitués. Ce qui nous intéresse, c’est de continuer à rester proches des réalités audiovisuelles d’aujourd’hui et d’ouvrir des espaces de discussions. En raison de contraintes budgétaires liées à la diminution de soutiens, il est important pour nous de proposer un projet convaincant pour de nouveaux partenaires. Le Prix Farel interroge notre rapport à l’information sur le fait religieux. S’il y a une chose qui a changé depuis la dernière édition, c’est notre manière de nous informer, notre rapport à l’information. Les études le montrent, que cela passe de plus en plus par des formats vidéo explicatifs. Par ailleurs, nous le pressentons tous, nous sommes pris dans cette «infobésité» , ce flux d’actualité qui demande de prendre du recul. L’information sur le fait religieux est aussi concernée par cette évolution de fond… et de forme !
En quoi consiste cette nouvelle catégorie « explainers » ?
Ce sont des vidéos explicatives produites par des journalistes et pour l’essentiel par des professionnels du web. Les explainers représentent aujourd’hui un format, un type de rapport à l’information, plus conversationnel qui offre un complément par rapport à d’autres formats plus traditionnels. Quelle place ont-ils dans notre construction du savoir, comment sont-ils fabriqués, par qui, dans quelles conditions, avec quel langage, pour quels publics : c’est ce que nous avons envie de mieux comprendre et connaître. À noter que ces formats courts ont tendance à s’allonger, nous accueillons des explainers très synthétiques et d’autres bien plus approfondis. S’ils sont issus de la culture YouTube et peut-être encore associés dans l’imaginaire à des formats pour adolescents ou jeunes adultes, ils sont aujourd’hui complètement intégrés dans une grande série de médias et consommés par des gens de tout âge et de tous horizons.
Vous organisez également des débats liés à ces formats ?
Nous avons envie d’avoir une conversation « meta », sur la manière de produire ces formats, plutôt que sur leur contenu, ou leur forme, uniquement. Parce que dans une époque caractérisée par la polarisation, la qualité de l’information, le rapport aux sources, l’approfondissement nous apparaissent essentiels, y compris sur le fait religieux.
Un débat s’intéresse aux représentations du passé avec l’IA ?
C’est un sujet qui concerne particulièrement les représentations historiques et qui est encore plus spécifiques pour les questions religieuses. Comment représenter des personnages réels ou imaginaires, sachant le poids, l’impact que peuvent avoir ces représentations sur nos croyances et nos affects aujourd’hui ? Quels rapports et dialogues entre l’art, la technique, l’histoire ? Que peut apporter l’IA, quelles sont les forces des représentations artistiques, quels problèmes, difficultés, limites on rencontre quand on doit représenter Abraham, Marie, Bouddha ou une divinité Aztèque ? L’idée est d’approfondir les complémentarités, les influences respectives, les perspectives croisées, les différences, les forces et limites, bref, d’amener à appréhender un peu mieux cette complexité.
Le programme en bref ?
Nous avons cette année 30 films, 3 catégories et 3 thématiques. La sélection a été très difficile. Nous avons reçu plus de 170 films. Cela a nécessité un long travail de tri. Des films nous sont encore parvenus quelques jours avant le bouclage du programme ! Il y a une attente, une impatience même de la part d’anciens participants.
Parmi les thématiques abordées, quelles sont celles qui ressortent le plus cette année ?
Les thématiques en lien avec l’écologie ressortent très clairement. Plusieurs films abordent la question du futur, du lien au vivant, à la nature, du fait de ralentir, de la sobriété, des changements de vie. C’est une tendance très nette, un questionnement profond. La question du conflit et plus précisément de l’après, ressort également, avec un accent particulier mis sur l’impact pour les populations civiles. Au-delà des lignes de front, il y a des dommages invisibles, des existences séparées, déchirées, des survivants qui déploient des trésors d’énergie, d’imagination et de courage pour se réinventer. Cela redonne une taille humaine à ces affrontements géopolitiques qui parfois nous dépassent.
Cette édition n’aurait pas été possible sans l’engagement de nombreuses personnes ?
Pour cette nouvelle édition, nous avons une toute nouvelle équipe opérationnelle, un comité renouvelé en partie, donc un nouveau départ sur le plan humain. Le festival n’existerait tout simplement pas sans toutes les personnes qui le construisent. Je salue l’engagement, la rigueur, la réactivité et la souplesse de toutes les personnes impliquées, parfois à titre bénévole, puisque les temps de travail accordés par des partenaires ont été dépassés. Rien n’a été simple. Nous avons été nombreux à découvrir ce festival, l’équipe ne partage pas les mêmes lieux de travail, rarement les mêmes horaires ou temps de travail. Puisqu’il s’agit d’événementiel, il faut aussi beaucoup de souplesse et de réactivité. Je suis épatée par le travail accompli, mais consciente aussi que des limites humaines et financières sont atteintes. Cette édition, en accord avec tous les partenaires a d’emblée été conçue comme un test, nous en tirerons des leçons pour la suite. Dans l’immédiat, nous espérons surtout que le public sera au rendez-vous et sommes curieux de ses retours !
Prix Farel
Ve 15 au di 17 novembre, Cinéma Rex, Neuchâtel.
Programme et infos : www.prixfarel.ch.
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